Paris : Fontaines de Pol Bury au Palais Royal, l'art cinétique et aquatique des Sphérades - Ier



Les Sphérades de Pol Bury, fontaines cinétique lovées au cœur du Palais Royal, font entendre un chant fluide, murmure des flots auquel se mêle le cliquetis du métal et les craquements du mécanisme horloger. Les deux oeuves commandées en 1981 par Jack Lang alors ministre de François Mitterrand ont été installées dans la Cour d’Orléans en 1985 entre la Cour d’Honneur où se trouvent les colonnes de Buren et le jardin, entre le Conseil Constitutionnel et le Ministère de la Culture. Rénovées en 2015, les Sphérades n’ont cependant pas retrouvé toute leur mobilité. L’eau glisse sur les courbes miroitantes des boules en acier inoxydable. Colonnades et jardin se reflètent dans l’éclat froid de l’acier, images mouvantes, poésie hypnotique. En travaillant l’élément liquide, Pol Bury a choisi d’invoquer la précision des humeurs dynamiques qui laissent une place à l’inattendu. 









Dans ce lieu unique, trois siècles d’architecture s’entremêlent. Les bâtiments originaux du Palais Royal ont été édifiés pour le Cardinal de Richelieu par l’architecte Lemercier à qui l’on doit également la Sorbonne. Ce n’est qu’en 1634 que le corps principal face au Louvre devient résidence royale à l’occasion de la Régence d’Anne d’Autriche. 

La famille d’Orléans investit les lieux partir de 1661. L’ouvrage remanié au XVIIIème et XIXème siècle connaît des temps mouvementés, haut lieu de la prostitution et des jeux d’argent avant de replonger dans la quiétude. Aujourd’hui, havre de paix et d’histoire, le Palais Royal attire en nombre les touristes mais également les Parisiens qui apprécient la promenade et fréquentent assidument la Comédie française, le théâtre du Palais Royal ou encore le restaurant au décor classé le Grand Véfour. 








Peintre, sculpteur créateur de bijoux et graphiste, l'artiste belge Pol Bury (1922-2005) est l’un des pionniers de l’art cinétique. Des premiers reliefs mobiles de 1953 inspirés par les œuvres d’Alexandre Calder jusqu’aux fontaines monumentales en métal, il n’aura cessé tout au long de sa vie d’expérimenter dans une quête permanente de nouveaux moyens d’animer ses créations. 

Pol Bury en véritable plasticien-ingénieur invente de nombreux moteurs électriques puis hydrauliques dont la technicité se plie à la fantaisie poétique de l’artiste ainsi qu’à son humour. Il cherche à « intervenir dans la respectable ordonnance de la géométrie, des décors, des visages et s’imaginer ainsi qu’on peut chatouiller la pesanteur ». Son travail sur le mouvement incarne l’éloge de la lenteur. Invitation à la contemplation zen, il convoque la lumière et la mobilité des éléments afin que surgisse l’inattendu, l’accident heureux qui dilate le temps, fait naître l’émotion de la combinaison aléatoire des formes.








Les deux fontaines du Palais Royal ont trouvé place dans des bassins préexistants. La circulation de l’eau anime les modules géométriques dans un mouvement continu dont le mécanisme demeure invisible en surface. Sur des plateaux dodécagonaux, dix-sept sphères de différentes tailles en acier inoxydable poli, reflètent et multiplient l’espace. Dans un jeu d’effet miroir, le ciel, les jardins, les colonnades deviennent des éléments de l’oeuvre. Le mouvement des formes est multiple. A la circulation de l’eau, s’ajoutent les caprices de la météo, cavalcades des nuages, vent qui caresse les arbres, le passage des visiteurs, le vol des oiseaux. 

Artiste prolifique, Pol Bury a disséminé une soixantaine de fontaines sculptures dans l’espace public à travers le monde, animant les espaces urbains de ses créations ludiques.  La première se trouve à l’Université de l'Iowa (1969), les plus célèbres à la Fondation Maeght à Saint-Paul-de-Vence (1978) au Musée Solomon Guggenheim à New York (1980), au Palais du Gouverneur à Anvers (1981), à Séoul, une oeuvre créée à l’occasion des jeux Olympiques (1988) ou encore à Yamagata au Japon à la Tohoku University of Art & Design (1994).

Sphérades, une sculpture fontaine de Pol Bury
Cour d’Orléans - Palais Royal - Paris 1



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


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